« Œuvre colossale d’un homme et d’un peuple, tout ensemble une et complexe comme les Iliades et les Romanceros dont elle est sœur ; produit prodigieux de la cotisation de toutes les forces d’une époque, où sur chaque pierre on voit saillir en cent façons la fantaisie de l’ouvrier discipliné par le génie de l’artiste ; sorte de création humaine, en un mot, puissante et féconde comme la création divine dont elle semble avoir dérobé le double caractère : variété, éternité. » Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, livre troisième.

Hier soir, comme des milliers de Français, dans les larmes et sous le choc des images de notre cathédrale en flammes, je me suis rendue sur le parvis de Notre-Dame.

Je repensais à ce texte de Marc Bloch, ce résistant juif, qui a malheureusement été si souvent détourné par l’extrême droite, et ses mots résonnaient : « Il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France, ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la fédération. Peu importe l’orientation de leurs préférences. » Hier soir, résolument Français, nous étions croyants et non croyants, catholiques et athées. Nous étions bouleversés et unis.

Paradoxe de ces moments qui serrent l’âme et savent les rapprocher dans un même élan, une même émotion. Effet de sidération et volonté que ce que l’œuvre humaine a fait ne soit jamais défait. « Chaque face, chaque pierre du vénérable monument est une page non seulement de l’histoire du pays, mais encore de l’histoire et de la science et de l’art. »

Hier soir, c’est une part de nous qui brûlait et qui résistait à la chaleur et la violence du feu.

Ce sont des hommes et des femmes qui ont pris tous les risques pour permettre à Notre Dame de tenir debout ce matin et pour les siècles à venir.

Aujourd’hui, alors que nous sommes si nombreux à relire Victor Hugo c’est cette volonté commune de rebâtir qui doit nous porter. Notre pays le peut. Notre pays le mérite.